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Les chiffres trompeurs de la sécurité sociale

Quand les politiciens et les groupes d'intérêt se battent sur le sujet controversé de la réforme de la sécurité sociale, les statistiques sont souvent les cartouches de prédilection. Les chiffres, habituellement des chiffres astronomiques, sont utilisés par toutes les parties pour réduire à néant des arguments en faveur ou à l'encontre des modifications au système en vigueur. Et dans le processus, ce sont les spectateurs innocents qui reçoivent parfois des informations trompeuses.

En Amérique latine, les critiques des systèmes de sécurité sociale gérés par l'état les décrivent souvent comme des trous sans fond qui consomment une portion énorme des dépenses publiques et qui découragent la création d'emplois parce qu'une partie trop élevée du salaire de chaque travailleur est déduite pour les contributions à la sécurité sociale.

Ceci n'est que partiellement vrai. Le pourcentage des coûts directs des salaires représentés par les contributions à la sécurité sociale est en fait très élevé dans certains pays de la région : en 1995, ils s'élevaient à environ 30 % de chaque salaire au Mexique, au Brésil et en Colombie, et à un peu plus de 40 % en Argentine et en Uruguay. Ces chiffres s'inscrivent dans des programmes pour les personnes âgées, les handicapés, décès, maladies et maternité, accidents du travail et chômage.

Mais, contrairement à l'interprétation populaire, les dépenses publiques sur les fonds de la sécurité sociale sont en fait très réduites quand on les compare à celles des pays industrialisés. Entre 1990 et 1995, les pays d'Amérique latine ont dépensé une moyenne de 2,5 % seulement du PIB sur les fonds de la sécurité sociale, alors que les pays industrialisés ont dépensé 16,4 %. Ce contraste est encore plus fort quand la sécurité sociale est mesurée en pourcentage de toutes les dépenses publiques : les pays d'Amérique latine ont consacré une moyenne de 9 % du budget national à la sécurité sociale, alors que le monde industrialisé en a dépensé quant à lui 35,9 %.

Il y a deux explications fondamentales à la taille réduite des systèmes de sécurité sociale en Amérique latine. Tout d'abord, dans la plupart des pays, les bénéfices de la sécurité sociale sont perçus seulement par les anciens employés du service public et d'autres employés "formels". Des dizaines de millions de travailleurs informels ne reçoivent rien du tout. Ensuite, la région (avec les exceptions notables de l'Argentine et de l'Uruguay) possède une proportion beaucoup plus réduite de personnes âgées de plus de 65 ans que les pays industrialisés. Ce sont ces citoyens plus âgés qui représentent le gros des dépenses de la sécurité sociale.

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