Les grands argentiers des pays d’Amérique latine et des Caraïbes ont proposé que la BID crée un ensemble d’instruments financiers flexibles pour pouvoir venir rapidement à la rescousse des pays qui subissent l’impact économique et social des turbulences sur les marchés mondiaux.
Ces demandes ont été formulées lors de la réunion annuelle de l’Assemblée des gouverneurs de la Banque qui s’est terminée à Santiago du Chili le 22 mars.
Dans son discours de clôture, le président Enrique V. Iglesias a dit que les problèmes économiques mondiaux actuels allaient inévitablement se répercuter sur l’Amérique latine et les Caraïbes. Il faut certes s’en préoccuper, a-t-il affirmé, mais sans s’inquiéter.
Iglesias a salué la décision des gouverneurs d’ouvrir un débat sur la révision des instruments financiers de la Banque pour aider les pays membres à faire face à la fois au ralentissement économique immédiat et aux effets plus vastes de la mondialisation. Il a été proposé notamment de relever le plafond des financements directs de la BID en faveur du secteur privé et des prêts en faveur de l’ajustement structurel et d’assouplir les conditions que doivent réunir les pays emprunteurs dans la mise en œuvre des projets financés par la Banque.
" Nous assistons au lancement solennel d’un débat sur nos objectifs et nos instruments, a dit le président de la BID. Il convient de réviser les instruments traditionnels de la Banque."
Iglesias a souligné aussi que la BID resterait fidèle à sa vocation première : s’employer à faire reculer la pauvreté, à accroître la compétitivité des économies de la région et à consolider l’intégration.
La BID doit s'adapter. Dans sa déclaration de synthèse, le ministre chilien des Finances Nicolás Eyzaguirre Guzmán a fait remarquer que la région de l’Amérique latine et des Caraïbes était plongée dans un processus irréversible de mondialisation qui comporte à la fois des possibilités de progrès et des dangers sous forme de crises politiques, économiques et sociales.
Les organisations multilatérales telles que la BID doivent faire de gros efforts pour adapter leurs instruments à la nouvelle donne mondiale, a dit Eyzaguirre, qui est aussi le nouveau président de l’Assemblée de la BID. " Nous devons être flexibles pour soutenir les systèmes économiques de la région. Mais nous devons aussi être flexibles pour comprendre que la réforme ne peut s’opérer par la simple manifestation d’une volonté mais par un effort soutenu dans le temps. "
Eyzaguirre et Iglesias ont l’un et l’autre souligné la nature participative de la réunion annuelle à Santiago, qui a rassemblé non seulement les responsables économiques de la région mais aussi des délégués des 46 pays membres de la BID ainsi que des représentants du secteur privé, du monde universitaire et des organisations de la société civile.
Comme dans le cadre des réunions annuelles antérieures de la Banque, une série de séminaires a porté sur des sujets qui intéressent le développement de l’Amérique latine et des Caraïbes. Cette année, les séminaires ont examiné les obstacles à la croissance, les gages de la compétitivité, les répercussions sociales de la mondialisation et les rapports entre déontologie et économie. D’autres séminaires ont eu pour thèmes la gouvernance et le développement, les femmes qui font partie de la population active, l’ouverture de possibilités de développement aux personnes handicapées, la réforme de l’enseignement secondaire, le sport en tant que moyen de développement économique et social, les bienfaits des nouvelles technologies de l’information, la réforme des régimes de retraite et la modernisation de l’aviation civile.
Flexibilité et adaptation. Le Secrétaire mexicain au Trésor Francisco Gil Díaz était l’un des gouverneurs de la BID qui ont souligné le besoin de nouveaux équipements pour réduire la vulnérabilité des économies latino-américaines et caribéennes aux tourmentes extérieures. " Pour que la Banque serve bien ces priorités pour le développement, nous devons flexibiliser des politiques de prêts et créer de nouveaux produits financiers qui répondent mieux aux besoins de crédits de nos pays, a-t-il dit dans son discours aux gouverneurs de la Banque. Je fais allusion aux nouveaux produits tels que les facilités de crédit de soutien, les instruments de couverture du change et les opérations de programme qu’elle étudie à l’heure actuelle. "
Gil Díaz a appelé de ses vœux un surcroît d’efforts pour mettre en place une assurance contre les catastrophes naturelles, comme celles qui ont laminé les pays d’Amérique centrale et des Caraïbes ces dernières années.
Plusieurs gouverneurs latino-américains ont soutenu une proposition visant à relever la limite maximale des financements accordés directement au secteur privé afin de consolider les privatisations dans la région et assurer leur continuité.
Le ministre brésilien de la Planification Martus Tavares a dit que son gouvernement soutenait avec enthousiasme une recommandation en faveur de la suppression du plafond de 5 % pour les opérations en faveur du secteur privé en proportion du total des prêts de la BID, " pourvu que la maîtrise des risques de ce portefeuille de prêts soit renforcée ".
Le ministre espagnol de l’Économie Rodrigo de Rato y Figaredo a fait remarquer que les institutions financières multilatérales comme la BID sont plongées " dans un processus d’adaptation à une économie de plus en plus mondialisée et interdépendante. Cela étant, nous devons réexaminer le rôle pivot que jouent les financements privés en favorisant la croissance dans de nombreux pays en développement, pour améliorer leur ciblage et leur efficacité ".
Rato et d’autres gouverneurs de la Banque ont proposé la création d’un groupe de travail au sein du Comité de l’Assemblée des gouverneurs pour analyser la révision des politiques qui encadrent les instruments financiers de la Banque.
Des gouverneurs des pays non emprunteurs ont également demandé à la BID d’approfondir sa coopération avec la Banque mondiale et le Fonds monétaire international. Ils ont loué la participation de la BID à l’initiative internationale visant à alléger le fardeau de la dette des pays pauvres très endettés (PPTE), qui, en plus de réduire la charge financière des pays bénéficiaires, prévoit de nouvelles incitations à la lutte contre la pauvreté et la corruption.
Les délégués ont aussi souligné la nécessité pour la BID de faire davantage pour réduire la pauvreté et les inégalités sociales et favoriser une croissance durable en harmonie avec la protection de l’environnement.
Ils ont également prié instamment la Banque de veiller à ce que l’assistance accordée aux pays à revenus moyens bénéficie aux catégories sociales les plus vulnérables, telles que les femmes qui sont des soutiens de famille, les jeunes, les personnes âgées, les handicapés ainsi que les minorités ethniques, raciales et linguistiques.